« La plus grande richesse actuelle du Népal est l’exportation de Népalais pour le travail »
-Médecin népalais
C’est avec cette triste annonce que j’ai commencé mon aventure au Népal. Cette phrase a vraiment pris du sens avec le recul.
Conditions de travail
À toutes les fois que j’ai transité par Doha, j’ai vu cette scène :

(Vous me direz qu’ils ne semblent pas à leurs meilleurs, mais c’était le milieu de la nuit.)
C’est la scène prise juste à l’extérieur des portes de sécurité de l’aéroport de Doha. C’est la scène de Népalais arrivés au Qatar qui y viennent travailler. Qui attendent que leurs employeurs viennent les chercher. Ça devrait être une bonne nouvelle, non? Les gens vont dans un pays plus riche, envoient de l’argent à la maison par Western Union. Il faut bien mettre du dal baht sur la table.
Le problème, c’est que les conditions dans lesquelles les Népalais travaillent sont parfois inhumaines. Morts par déshydratation, chutes mortelles, insuffisance cardiaque, heures de travail exagérées, etc. Plusieurs sont sous-payés, à seulement 9 $ par jour. Le Qatar n’aurait jamais passé les évaluations de la CSST.
Mais les Népalais continuent d’y aller, car ils n’ont pas tant le choix. Vous direz qu’on a toujours le choix. Mais des fois il faut juste choisir la situation la moins pire. Le dilemme est simple : rester dans un pays pauvre, sans réelle économie, sans grande possibilité d’emplois. Ou bien aller travailler à l’extérieur et courir le risque d’être maltraité. Plusieurs choisissent de se sacrifier pour leurs familles.
En plus, 9 $ par jour, c’est beaucoup plus que le népalais moyen qui gagne en moyenne 400 U$ par année (un peu plus que 1 U$ par jour).
Certains disent que leurs conditions sont de l’esclavagisme moderne. Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus sur le sujet, aller lire la BD journalistique Days of destruction, days of revolt de Joe Sacco.
En gros, les esclaves modernes ne bénéficient d’aucun privilège de santé, ont très peu de droit, car leurs employeurs leur ont enlevé et sont victimes de violence et de chantage. Ces « nouveaux esclaves » américains se font exploiter dans des champs d’orange ou sont ceux qui vous servent un café au salaire minimum à New York. La seule différence entre l’esclavagisme d’il y a 200 ans et celui d’aujourd’hui est que maintenant, ils sont payés. C’est de l’esclavagisme déguisé.
Le Népal et l’Inde
Le Népal, il ne faut pas oublier, est dans les pays les plus pauvres au monde, rempli de corruption et sans grandes ressources naturelles. Coincé entre deux grandes puissances, l’Inde et la Chine, il est la victime des caprices de ceux-ci.
Le Népal n’a pas vraiment de ressources naturelles. Le tourisme est important, mais il a ces limites. Le reste de l’économie est basé sur l’agriculture et les textiles. Il y aussi pas mal de gogosses vendues dans les rues comme souvenir. Mais à part pour le tourisme qui apporte des gros sous, le reste est basé sur le commerce d’affaires cheaps à 1 $. Il n’y a pas de mines d’or ou de pétrole.
Pour ajouter au problème, depuis le tremblement de terre, l’achalandage a diminué au Népal. Puis avec la peur qu’un autre pourrait frapper le pays, les gens sont parfois hésitants à y retourner.
En fin de compte, beaucoup de projets d’infrastructure sont supportés par des ONG, de l’argent privé ou par des dons d’autres gouvernements. Le Népal dépend des donations et du bénévolat. Ils sont sur le respirateur et seuls, ils n’y arriveraient peut-être pas.
Culturellement et géographiquement, le Népal et l’Inde sont proches. L’Inde est un peu comme le grand frère du Népal. Mais l’Inde utilise sa puissance pour faire de l’intimidation, des blocus sur le pétrole, du chantage et corrompre leurs dirigeants. L’Inde tente de contrôler le Népal, et le fait très bien. C’est le grand frère méchant.
Lié par le sang, le Népal continue à utiliser l’Inde, mais bien souvent à contrecoeur. Au Nord, les Himalayas créent une barrière naturelle entre le Népal et le Tibet qui limite les transports. Sans accès à un océan ou un plan d’eau pour faciliter le commerce, et avec un système routier désuet, tout doit passer par l’Inde.
Les Népalais
Ce qui m’attriste dans tout cela est que les Népalais sont vus comme de la chair à canon. Le plus symbolique reste les fameux Gurkhas, unité militaire d’élite népalaise reconnue pour être forte et sans peur, qui est envoyée à l’extérieur pour servir d’autres pays. Les Gurkhas sont un symbole de puissance, mais ils sont encore une fois de la chair à canon pour les autres pays.
Supposément, dans le Lonely Planet, il est écrit quelque chose dans le genre : « Au début, on va au Népal pour les montagnes. Mais on y retourne pour les gens. »
Pour tous ceux qui sont déjà allés au Népal, ils savent à quel point cette phrase est vraie. À quel point les Népalais sont généreux, accueillants et attachants. On s’y crée des amitiés qu’on n’oubliera jamais.
Après tout, le Népal reste dans les pays les plus sécuritaires au monde. Honnêtement, le plus dangereux là-bas c’est d’attraper la diarrhée. Parlez-en à Mickael.

Pour moi cette photo symbolise les Népalais. Tout y est. Les montagnes, un stupa, des femmes qui transportent du bois sur leurs têtes. Les Népalais sont tellement toughs.
Ce printemps, les montagnes étaient magnifiques. J’ai hâte de repartir pour aller les grimper, rêver d’ouvrir des voies, courir après mon souffle à 6000 mètres et plus.
Mais j’ai surtout hâte de retourner faire des bagels avec le voisin, discuter politique à Thorong Phedi ou prendre un thé avec les gens de la clinique médical.
À mes amis népalais!
